Des Russes contre la guerre en Tchétchénie
Aujourd'hui no 67 (23 juin 2000)
Le collectif, dont nous publions ci-dessous la déclaration,
s'est constitué à Moscou dans le but de dénoncer
la guerre et d'aider les réfugiés
tchétchènes. Il réunit des personnes de gauche,
des libertaires, des antifascistes... Cette campagne nous
paraît de la première importance à l'heure
où le nationalisme justifie les pires crimes et où les
libertés fondamentales sont menacées en Russie.
Solidarité contre la guerre !
Alors que nous entrons dans le XXIe siècle, la
société russe est confrontée au fait honteux
d'une guerre coloniale sanglante dans le Nord Caucase. Toute la
puissance de l'État "démocratique" russe a
été utilisé dans le but de soumettre un petit
peuple qui n'a voulu ni joindre les empires tsariste et stalinien, ni
la "fédération" de Eltsine. Des dizaines de milliers de
morts et de blessés physiquement ou mentalement ; des masses
appauvries ou devenues des réfugiés sans droits ; des
villes et des villages transformés en ruines. C'est le prix
à payer pour satisfaire les ambitions politiques de la classe
dirigeante russe décidée à renforcer et
augmenter sa domination.
Cette guerre, cyniquement présentée comme une
"opération anti-terroriste", est en fait un acte de terreur
d'État sur une grande échelle menée par les
dirigeants russes, ce qui a conduit, en retour, le peuple
tchétchène, désespéré,
privé de tout ce qu'ils avaient et ayant perdu leurs amis et
familles, à prendre les armes pour se venger. Les forces
armées fédérales, ravageant et brûlant
tout sur leur passage, "n'extirpent pas le fondamentalisme", mais
plongent socialement et économiquement la
Tchétchénie au Moyen Âge et, ainsi, créent
les conditions nécessaires au gain d'influence des forces
réactionnaires des islamistes radicaux.
L'agression montée contre la Tchétchénie, le
génocide contre son peuple, annonce au peuple russe
lui-même la menace d'un régime policier et militaire, la
répression des droits civils et la perspective de vivre dans
un état qui ressemblerait à la Biélorussie de
Lulashenko ou à une dictature sud-américaine. « Un
peuple qui en oppresse un autre ne peut jamais être libre
lui-même ».
Cette guerre est porteuse de conséquences socialement et
économiquement catastrophiques. Le financement de cette guerre
et la mise en place d'un régime d'occupation demande
d'importantes ressources et celles-ci ne peuvent être
prélevées que sur les travailleurs qui, même sans
cela, sont condamnés à une pauvreté
écrasante. Alors que des millions de personnes vivent dans le
besoin, des dizaines de milliards de roubles sont
dépensés à tuer et détruire. Vraiment, le
cynisme de la classe dirigeante et de ses représentants
politiques - tous les Poutine, Tchoubaïs, Ziouganov
- ne connaît pas de bornes !
Les crimes de l'impérialisme russe contre tous les gens qui
ont été traînés dans cette aventure
militaire doivent être stoppés avant qu'il ne soit trop
tard. Nous demandons :
- La fin immédiate des opérations militaires
et le retrait des forces d'occupation du territoire
tchétchéne ;
- Le droit pour le peuple tchétchéne de
décider en toute indépendance de son futur : la statut
de la Tchétchénie doit être librement
décidé par sa propre population sous le contrôle
des organisations internationales des droits de l'homme.
- Le dédommagement suffisant à toutes les
victimes de guerre, quelle que soit leur nationalité, pris sur
l'argent destiné à faire la guerre ;
- La punition des criminels de guerre à tous les
niveaux.
On ne peut compter sur le bon vouloir des politiciens russes, pas
plus que sur les cercle dirigeants de l'Ouest qui ne condamnent les
crimes de la machine de guerre russe qu'avec des mots et qui n'ont
jamais changé leurs plans ou leur partenariat avec
l'establishment russe pour défendre les vies et les droits de
ceux qui souffrent. La barbarie militaire ne peut être
stoppée que par le développement d'un mouvement social
de protestation à l'intérieur de la Russie même.
Une solution démocratique au conflit du Nord Caucase ne sera
obtenu qu'au moyen d'actions populaires, à la base.
Initier de telles actions et faire tout pour qu'elles se
développent est le devoir de tous les gens de gauche
démocratiques et anti-totalitaires qui adoptent une position
de principe, basée sur des idéaux de liberté, de
justice sociale et de respect de l'être humain, contre les
intérêts qui mènent cette guerre.
Nous appelons tous les progressistes de bonne volonté et
dotés de bon sens à tout faire pour aider, notamment
par une aide matérielle aux victimes de la guerre, et à
prendre part à une campagne de solidarité effective
avec le peuple tchétchène, une campagne contre la
guerre.
Les perspectives pour notre futur sont simples : soit une
société civile humanitaire se déclare en Russie,
soit nous nous retrouverons avec un état policier, prêt
à de nouvelles guerres et capable des pires crimes. Il est
temps de choisir !
Journal antifasciste Tchelovetchnost
Centre de recherche d'éducation Praxis
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